Que dire?? Oh j’en aurais tant. À écrire aussi. Mais les mots s’entassent là, au fond de ma gorge; je n’y arrive pas. Dans le fond c’est mon cœur qui chavire à chaque souvenance de ces pages lues; une après l’autre car chacun des mots m’a laissé, en dedans, de vives émotions.
Je vais tenter tout de même de vous étaler quelque peu mes ressentis face à ce magnifique écrit mais pardonnez d’avance si je coupe court car ce tout petit roman est si profond que je n’arriverai jamais à rendre à sa juste valeur toute la richesse de Matisiwin.
Et la richesse de ce roman se situe à travers le cheminement de Sarah-Mikonic Ottawa que nous suivons par la voix de sa grand-mère décédée qui va ''marcher'' à ses côtés tout au long de cette traversée que la jeune autochtone va parcourir afin de se retrouver mais aussi s’emplir l’âme et le cœur de celles qui étaient là avant, de qui elle est devenue et de ce qu’elle transmettra à sa fille.
Ma petite-fille, Nosim, n’aie pas peur. Tu sais qui je suis. Tu connais ma voix. Tu l’entends dans le vent qui soupire et dans les épinettes qui dansent. Dans le chant du traîneau porté par le tambourinement feutré des raquettes. Dans le son silence des flocons qui se déposent tout autour de toi. Je te parle de ce que tu es. Je te parle de ce qui se trouve sous la neige, et de ce que tu es venue chercher. Je suis ta mémoire.
Tout au long de ce voyage initiatique les mots de sa kokom, (grand-mère), vont lui raconter l’histoire des femmes de son sang. Chaque phrase, chaque regard, chaque silence vont se glisser dans ses pensées en lui offrant le moment présent mais aussi la triste réalité de ces blessures et déchirures héritage légué par l’horreur des pensionnats, l’innommable qu’ont vécu un nombre incalculable des siens.
On nous ramenait au retour de l’été des enfants qui chaque fois nous paraissait un peu moins les nôtres. […] Ils étaient si changés. Leurs vêtements, leurs cheveux, leur odeur… […] Ils avaient honte d’être nos enfants. Et nous avions honte aussi d’être de si indignes parents.
Des passages bouleversants. Une vérité dure, crue, malheureusement trop réelle et malgré tout, une histoire sous une plume belle, sobre et poétique à la fois. On sent au fil des pages l’amour et le grand respect de Marie-Christine Bernard pour ces êtres qui, malgré les souffrances, se tiennent et se tiendront toujours debout.
Matisiwin c’est l’hier que Sarah-Mikonic doit apprendre et comprendre; en apprivoiser le temps présent pour enfin vivre.
Et voilà que tu comprends que c’est ici que t’a menée le moteskano (le chemin des ancêtres), ici et maintenant devant moi, avec ta mère, et ta fille entre vous deux, et ce fil qui nous lie. Voilà enfin que tu sais qui tu es et d’où tu viens.
Finalement Matisiwin va me rester très longtemps en mémoire et migwech à Marie-Christine Bernard pour ce très bel hommage à toutes les kokom, tcotcom, tanis et nosim de notre Terre-Mère.
Matisiwin de Marie-Christine Bernard
Stanké 2015
Autres écrits de l'auteure sur ce blogue:
Autoportrait au revolver, Mademoiselle Personne, Monsieur Julot, Polatouches , Sombre peuple
22 commentaires:
Bizarrement, ce roman ne me tentait pas du tout... avant ce billet. Je prends bonne note!
@ Karine:)
Il m'est arrivé aussi de lire certains livres qui ne m'attiraient pas au début et heureusement que je me suis tout de même décidée car j'ai fait de belles et surprenantes découvertes. Je t'en souhaite tout autant si tu te décides à lire celui-ci.
Déjà noté chez Lucie. Il fera écho, dans la série actuelle des retours vers les racines à Michel Jean et Lucie Lachapelle.
Le Papou
J'aurais pu écrire le même commentaire que Karine.
@ Le Papou
Une bien belle découverte alors. Au plaisir.
@ Claude Lamarche
Et je te réponds idem à ma réponse sous le commentaire de Karine: ;-)
ça a l'air très fort, tu m'intrigues !
@ Theoma
Avant tout bienvenue sur mon petit chez-moi.
Concernant Mitasiwin, si les amérindiens t'intéressent, si les femmes amérindiennes te ''parlent'' si leur culture, leur passé,leur présent et surtout leur espoir et avenir t'intéressent, ce roman est pour toi.
Bonne future lecture.
J'ai aimé, difficile même de ne pas aimer, à moins d'être une personne indifférente. On est loin de la fiction ici, c'est assis sur une réalité.
Par contre, j'ai moins aimé que toi. Si c'était la toute première fois que j'en entendrais parler, peut-être ma lecture aurait-elle été différente. J'ai tellement aimé faire connaissance avec cette réalité à travers une histoire plus romancée, celle de Michel Jean "Elle et nous".
N'empêche que c'est un livre fort et je reconnais en toi la femme de coeur.
@ Venise
Il est vrai qu'étant métissée (de sang malécite et blanc) cette histoire m'a beaucoup touchée comme toutes celles racontant les mêmes vérités amérindiennes d'ailleurs. Mais d'aussi près de la réalité j'aime mieux écrit ainsi que trop romancée ;-) Tu vois; nos goûts diffèrent sur ce point mais ça n'a pas d'importance. L'important c'est que justement il faut que ce soit lu, vu et entendu pour que cessent cette noirceur et que le mot vivre pour plusieurs soit enfin possible.
Tu as parfaitement raison sur ce point, c'est un roman qu'il faut lire. Je le fais circuler pour ceux et celles qui hésitent à l'acheter.
Tu racontes bien à quel point ce livre t'a marqué, rien que pour cela, je vais noter le titre ;-).
Migwech Venise. Tu as le coeur à la bonne place ;-)
@ Kidae
Et j'espère que tu le trouveras et le liras ma belle. Bonne future lecture.
Si je puis m'immiscer...
D'abord, merci infiniment Suzanne pour ces beaux mots. Cela me touche beaucoup. J'ai mis énormément dans ce petit livre...
Cela dit je voulais apporter une précision au commentaire de Venise, dont j'apprécie toujours par ailleurs le regard franc, juste et amoureux des livres. Tu dis que "Matisiwin" s'assoit sur une réalité et n'est pas aussi romancé que, par exemple, "Elle et nous" de Michel Jean. Au contraire! C'est tout romancé. Rien de ce que je raconte n'est arrivé pour vrai à mes personnages qui sont tous fictifs. Comme Michel s'est inspiré de ce qu'on lui a raconté à propos de sa grand-mère, je me suis inspirée des histoires qu'on m'a racontée. Mon amie Samantha, à qui est dédié le livre, a bien marché le Moteskano, mais n'a pas du tut vécu la même vie que ma Sarah, ni ses parents, etc. C'est vraiment de la fiction. Tant mieux si ç'a l'air si vrai, au fond...
Bonne journée et bonne lecture à tous!
MC
@ Marie-Christine Bernard
Merci beaucoup d'avoir pris le temps de vos mots dame Marie-Christine. Votre ''Matisiwin'', bien qu'une histoire fictive m'a vraiment émue et je vais en garder pour longtemps un très beau souvenir de lecture.
Voilà un roman qui m'avait échappé, je le note avec enthousiasme :-)
@ Yueyin
Vite, reprends-toi car il te faut découvrir cette histoire aussi belle que bouleversante. Bonne future lecture.
Oh comme ça a l'air beau, et comme tu es touchée ;). Merci pour ce coup de coeur ! Tu vas donner envie.
@ Antigone
En effet, beau, touchant mais dur et difficile par moments. Un roman à lire, relire, doucement... entre les lignes. Merci pour tes mots Antigone.
Je n'en avais pas encore entendu parler. J'aime beaucoup la littérature autochtone et les romans qui en parlent. Ce sera un de mes prochains achats. Merci.
@ Bonjour Argali.
Je te souhaite une belle rencontre. Tu me diras.
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