lundi 30 juin 2025

Enfants du Lichen, Maya Cousineau-Mollen

 

Dans ce recueil, la voix de la poète se fond dans la mémoire du territoire, de la culture, de ses racines, la mémoire du corps intime autant que celle, atrophiée, de l’Histoire. ¨La première partie, Enfants du lichen, souligne avec tendresse et désir de guérison l’urgence de ne pas fermer les yeux sur les disparitions d’enfants et de femmes, sur l’exclusion, les dépossessions et le mépris. Avec la seconde, Une balle en réserve, la colère reprend ses droits. Ces deux volets indissociables font appel au devoir de mémoire.


Quel magnifique recueil que nous offre Maya Cousineau-Mollen avec « Enfants du lichen ».  En fait, c’est un véritable trésor que de tenir entre les mains les écrits de cette poétesse dont les mots nous chamboulent le cœur. Ces mots qui se promènent au fil des pages et que l’on suit tantôt avec un petit sourire aux lèvres, tantôt avec la larme à l’œil car témoins du passé, de la dépossession du territoire, de la douleur d’un peuple, de l’éloignement involontaire, de colère mais aussi d’espoir et de courage.  

Et ils sont beaux les mots de cette auteure qui, de sa plume, sait nous émouvoir en nous racontant l’histoire des siens dans un cri du coeur.  

Extraits

« Je plante des mots

   Comme des coups d'épée 

  Libérant les démons »  

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« Tu as voulu faire de moi un fantôme 

Sans histoire et sans beauté

Pourtant je reste

Dans la magnificence. »  

Vraiment son écriture est d’une beauté qui remue l’intérieur et entre ses lignes, les images tournoient entre hier et aujourd’hui et nous atteignent directement au cœur.

 Extraits

« Qui écrit

Se tient debout

Et rêve en prose »


« Dans les jours à venir, je serai lassitude
En quête d’un minime espoir

Chaque petite perle apposée
Sur cette œuvre in memoriam

En vos mémoires, mes sœurs perdues
Une vaine prière pour un retour impossible

Il vous reste un territoire-linceul
Brodé de la soie du lichen »

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« Donnez-moi un soleil

De l’air vivifiant

Et de l’espoir ténu

De mes mains

J’en ferai une œuvre d’art »

 

Décidément avec « Enfants du lichen »,  Maya Cousineau-Mollen a réussi car ce recueil est une véritable œuvre d’art truffé de petits bijoux qu’il vous faut lire et relire sans hésitation.   

 

« Enfants du Lichen »,  Maya Cousineau-Mollen

Hannenorak, 2022








lundi 23 juin 2025

Dernière soirée, Lisa Gardner

 

Timothy O’Day était un pro de la randonnée en forêt. Pourtant, il y a disparu sans laisser de traces lors de son week-end d’enterrement de vie de garçon, laissant derrière lui deux parents inconsolables, une fiancée désespérée et quatre garçons d’honneur rongés par la culpabilité.
Frankie Elkin ne connaît rien à la forêt. Elle a en revanche un flair unique pour retrouver les disparus. Lorsqu’elle apprend qu’une ultime opération de recherches est organisée cinq ans après la disparition de Timothy, elle prend la route pour les montagnes du Wyoming et se joint à l’équipe. Mais à mesure que l’expédition s’enfonce dans ce territoire sauvage, il devient évident que quelqu’un est prêt à tout pour faire échouer les investigations.
 

Après avoir beaucoup aimé L’été d’avant je n’ai pas hésité à me procurer la deuxième aventure de Frankie Elkin avec Dernière soirée et je n’ai pas regretté mon choix.  J’avoue que j’aime bien cette nouvelle « enquêtrice » qui n’a qu’un but celui de retrouver des êtres disparus depuis nombre d’années mais sans résultats positifs malgré des recherches intensives.  

 Cette fois Frankie se joint à une équipe de sauveteurs afin de retrouver Timothy dont la disparition date de cinq longues années.  Mais cette quête ne sera pas de tout repos car le tout va se dérouler en pleine forêt dans un milieu hostile que Frankie devra apprivoiser si elle veut réussir sa mission. De plus ses compagnons ne sont pas tous friands de sa venue parmi les chercheurs ainsi Frankie va devoir non seulement s’habituer aux difficultés d’une nature inhospitalière mais aussi aux caractères hostiles de ses compagnons de route.

 Ce deuxième volet est d’autant plus intéressant car on en apprend beaucoup plus sur qui est Frankie Elkin. Au fil des chapitres, on en découvre plus sur son passé quelque peu nébuleux, sur les raisons pour lesquelles elle est si désireuse de se lancer dans ce genre de recherches. Pourquoi tant de détermination? Quel but vise t-elle vraiment? Peut-être veut-elle se sauver elle-même sans se soucier de ce qu’elle risque au long de ses recherches! 

 J’aime bien ce genre de personnage; j’aime les êtres marginaux qui carburent à l’humanité et Frankie est de ceux-là. Fonceuse, curieuse, peureuse par moments, pas toujours sûre d’elle et ne désirant que faire le bien à sa façon. Bien sûr elle a ses défauts, têtue parfois trop mais  surtout, elle a un franc parler qui ne plaît pas à tout le monde; ce qui lui occasionne souvent des ennuis.  Quant aux autres protagonistes, ils sont aussi intéressants au déroulement de cette escapade notamment Martin, le père du disparu ainsi que les amis de Timothy sur qui plane la culpabilité depuis la disparition de celui-ci. Mais chacun doit apprendre à composer avec ce qui les ronge afin d’aider Martin. Mais rien ne sera facile dans cette escapade en pleine forêt où la nature ne leur fera aucun cadeau. De longues marches, méconnaissance des lieux, car ces paysages bien que fort beaux sont sauvages et hostiles à ces chercheurs non expérimentés. Bref, une recherche de la vérité qui ne sera pas de tout repos et qui apportera bien des ennuis à Frankie et ses compagnons avant de connaître le fin mot de l’histoire.  

Finalement, avec Dernière soirée l’auteure nous offre un suspense haletant sans temps morts qui a retenu mon attention du début à la fin au point que j’espère bientôt un troisième volet.   


Dernière Soirée, Lisa Gardner

Albin Michel, 2025

Traduction : Cécile Deniard

Autres romans de l’auteure sur le blogue :   La maison d'à côté  - (enquêtes Frankie Elkin) t1- L'été d'avant

samedi 17 mai 2025

La Massaï blanche, Corinne Hofmann

 

Lorsque, à 27 ans, Corinne Hofmann foule le sol de Mombassa, elle ne sait pas encore que sa vie va prendre un tournant décisif. Venue au Kenya pour les vacances, il suffit du regard perçant d'un guerrier massai, Lketinga, pour ravir la jeune femme à son amant, à sa culture et à sa vie de commerçante de Biel, en Suisse. En quelques mois, Corinne Hofmann lâche les amarres de l'Europe pour s'immerger dans un nouveau monde et s'installe au cœur de la brousse aux côtés de son amour africain. Est-elle vraiment prête à y tenir le rôle d'une épouse modèle en pays massaï ?

 Mon avis (Lu il y a un bout)

Jusqu’à quel point doit-on aller par amour? Combien ou comment peut-on endurer au point de risquer de se perdre soi-même par ce sentiment? Certains/ certaines vont jusqu’au bout d’eux-mêmes et Corinne Hoffmann a connu ces sentiments qui l’ont menée à nous raconter son histoire.

Ce n’est pas un grand livre côté écriture mais elle a su tout de même nous narrer cette aventure incroyable dans ses mots à elle venus tout droit de son cœur.
Je n’ai pas détesté parcourir ce qu’elle nous décrit de cette Afrique noire trop méconnue, de la beauté des paysages qu’elle nous dépeint avec amour les us et coutumes parfois très difficiles à vivre que la majorité des petits occidentaux gâtés que nous sommes ne pourraient endurer.

Cette femme, au travers tout ça, a usé d’un courage incroyable afin de faire face à celui pour qui elle a tout quitté tellement elle l’aimait mais qui est devenu d’une jalousie à faire peur. Elle a traversé bien des contraintes, elle a dû s’habituer à vivre dans des conditions très pénibles, elle a parcouru des milles; bref, elle a vécu le choc des cultures très abruptement.

Je ne vous raconterai pas toute l’histoire afin de ne pas trop vous en dévoiler. Je ne vous dirai pas non plus que c’est une grande oeuvre mais pour ceux et celles qui aiment les histoires vraies qui sortent un peu de l’ordinaire bien, La Massaï blanche est pour vous. 

La Massaï blanche de Corinne Hofmann
Pocket 2002, traduction : Anne Weber

  J'ai suivi obstinément le grand amour de ma vie, et j'ai vécu le ciel et l'enfer. Ce fut mon plus grand combat de survie. Une aventure ininterrompue, qui m'a menée au bout de mes limites corporelles et psychiques. Un combat que ma fille Napirai et moi avons finalement gagné. (Corinne Hofmann).


mardi 6 mai 2025

Au nord de la frontière de R.J Ellory

 


Victor Landis est shérif dans une petite ville de Géorgie. C’est un homme solitaire, qui a voué son existence au travail. Pour toute famille, il ne lui reste que son frère, Frank, avec qui il a partagé une enfance misérable avant qu’une brouille ne les sépare. Lorsque Frank est retrouvé mort dans des circonstances étranges, Victor décide de se rendre dans le comté de Dade, près de la frontière avec le Tennessee, afin d’en savoir plus. […]


D’entrée de jeu, je vous affirme qu’il est difficile de lâcher cette lecture une fois commencée car, avec sa plume talentueuse, l’auteur a réellement pris en otage mon attention et ce jusqu’à la dernière ligne.

Non, non, je n’exagère pas ;  « Au nord de la frontière » est ce genre de roman qui sait capter notre intérêt autant par son intrigue très bien menée que par ses personnages dont chaque portrait sied fort bien au déroulement de l’histoire. Particulièrement celui de Victor Landis, veuf sans enfant, ayant pour seule compagne la solitude. Il semble heureux dans sa petite vie bien ordinaire de shérif pour qui le travail le comble très bien mais sa vie va changer du tout au tout lorsqu’il va apprendre le décès de son frère, shérif comme lui, tué sur une route déserte. Bien qu’en froid avec celui-ci depuis un bon nombre d’années, Victor va se rendre dans les Appalaches pour les funérailles mais dès son arrivée, il va apprendre que la mort de son frère est plus que suspecte et qu’elle semble liée à un autre homicide.  Alors Victor va se lancer dans une double enquête afin d’éclaircir ce qui a bien pu se passer.

Au fil des pages on se retrouve aux côtés de Victor à suivre et découvrir des secrets enfouis depuis longtemps. Des rencontres inusitées, des gens suspects, des êtres humains pour qui les liens sont plus forts que tout et qu’ils seraient prêts à faire n'importe quoi pour préserver ce qu’ils sont et ce qu’ils font, bien ou mal. Puis, tout au long de l’enquête, on va vivre en même temps que Landis, ses peines, ses peurs, ses doutes, ses remords mais surtout son désir d’apprendre à se libérer de tout ce négatif qui l’entoure et tisser à nouveau des liens en toute humanité.

Comme à son habitude l’auteur maîtrise avec brio son intrigue et l’histoire se déguste lentement.  Finalement, lire R.J. Ellory est un plaisir à chaque fois et laissez moi vous dire qu’avec « Au nord de la frontière »,  l’auteur a une fois de plus réussi son pari même qu’il s’est surpassé. 


Au nord de la frontière,  R.J. Ellory

Sonatine, 2024

Traduit de l’anglais par Fabrice Pointeau 


Autres romans de l'auteur sur le blogue: Le Carnaval des ombresLe chant de l'assassin Le jour où Kennedy n'est pas mort  Les anges de New-York - Les assassins - Les fantômes de Manhattan - Mauvaise étoile - Papillon de nuit - Seul le silence - Un coeur sombre


mardi 8 avril 2025

L’été d’avant : Lise Gardner


     Frankie Elkin s'est donné pour mission de retrouver des personnes disparues que la police et leurs proches ont cessé de chercher. 
Elle enquête à Mattapan, un quartier difficile de Boston, sur la disparition d'Angélique Badeau, une adolescente haïtienne. Face à l'opposition de la police et à la méfiance de la famille, elle comprend que personne ne veut répondre à ses questions.

 Il y a un bout que je n’avais lu un roman de Lisa Gardner et j’avoue qu’avec « L’été d’avant » je vais me remettre à ses romans sans plus attendre. 

J’ai vraiment aimé cette histoire qui a retenu mon attention de la première à la dernière page. Bien écrit ce polar avec juste assez de suspense et de tensions pour captiver notre intérêt au fil des pages. De plus, j’ai beaucoup aimé suivre les aventures de Frankie Elkin, cette enquêtrice qui s’est donné pour mission de retrouver des personnes disparues dont les recherches ont été abandonnées par les instances policières. À ce jour, elle a retrouvé plusieurs disparus mais malheureusement les personnes retrouvées étaient mortes. Mais elle est tenace cette Frankie. Elle aimerait bien que ses prochaines recherches soient plus fructueuses  afin de ramener à leurs familles ces êtres disparus.  

  Laissez moi vous dire que cette Frankie est têtue comme pas une. Ancienne alcoolique elle ne boit plus depuis neuf ans et quelques mois mais l’envie est toujours là à lui coller à la peau! Malgré son passé tourmenté, ses drames douloureux, ses souvenirs qui la hantent, malgré deux rechutes, déterminée à ne plus replonger elle se lance corps et âme dans ses recherches.  Elle a tout laissé derrière elle : maison, voiture, petit ami, travail. Alors, cette mission de retrouvailles est aussi pour enfin donner un sens à sa vie.

   Comme nouvelle recherche, elle se rend dans un quartier de Boston dans le but de retrouver Angélique, une jeune fille de quinze ans, que sa famille n’a pas revue depuis près d’une année! Mais Frankie ne sera pas bien accueillie car la  population de ce quartier est majoritairement haïtienne et voit d’un mauvais œil cette petite blanche fouiner dans la vie d’une famille d’ici. Mais ils ne connaissent pas l’entêtement et la détermination de notre enquêtrice qui va tout faire pour atteindre son but et savoir ce qui est arrivé à la jeune Angélique.    

« L’été d’avant » est un polar qui se lit facilement. Une histoire captivante que j’ai parcouru avec plaisir et surtout, une belle rencontre avec l’héroïne et humaine Frankie sans oublier bien entendu d'autres intéressants et attachants personnages dont Piper la chatte grincheuse!     

Finalement, je n’hésite aucunement à vous conseiller cette lecture. De mon côté, je file me procurer la prochaine enquête de Frankie : « Dernière soirée ». 

 

L’été d’avant, Lisa Gardner

Albin Michel, 2024

Traduction : Cécile Deniard

Autre roman de l'auteure sur le blogue:  La maison d'à côté


lundi 10 mars 2025

La dernière récolte, John Grisham

Grisham nous raconte, par la voix du jeune Luke, la vie des paysans et des saisonniers, obligés de partager une promiscuité déplaisante durant les quelques semaines que durent la cueillette du coton. Enracinés jusqu’à l’absurde dans cette vie de misère et de privations, ces hommes et ces femmes vont se battre contre le temps et contre les pluies pour sauver la récolte qui ne peut pas être la dernière. 

Mon avis (Lu il y a un bout)

À travers les yeux d'un garçon de sept ans, nous suivons l'histoire d'une famille de fermiers de l'Arkansas dans les années 50.  
Ce roman de Grisham est inhabituel car l’auteur écrit surtout des intrigues juridiques. Cependant, ce bouquin est excellent et est un très beau témoignage de la vie rurale américaine des années cinquante.
 

Un livre écrit avec émotion et justesse nous racontant le quotidien des Chandler,  ces ramasseux de coton travaillant du matin au soir pour survivre dans un sud américain austère, chaud, où cyclones et orages peuvent détruire, en quelques minutes, tout le travail de ces pauvres gens. 

« Ceux des collines et les Mexicains sont arrivés le même jour. Un mercredi, en ce début du mois de septembre 1952. […]Mais le coton montait à la taille de mon père, au-dessus de ma tête. Je l'avais surpris, avant le souper, échangeant à voix basse avec mon grand-père des paroles qu'il ne nous était pas souvent donné d'entendre ; il était question d'une "bonne récolte. »

Le narrateur est un jeune garçon et Grisham a su très bien se mettre dans la peau de cet enfant en nous décrivant une belle histoire aux personnages très attachants dans des mots simples d’une prose juste et belle. L’auteur rend très bien l’ambiance du vieux sud étatsunien où les changements, les temps modernes ou encore les différences avaient peu de place.  Les travailleurs étrangers, bien que fort utiles, devaient endurer le racisme omniprésent ce qui pouvait provoquer de durs combats et parfois même l’inévitable.    

« Les seuls à gagner de l'argent étaient les propriétaires de leurs terres.
Ceux qui, comme nous, cultivaient les terres en fermage essayaient de ne pas en perdre. Les plus mal lotis étaient les métayers, condamnés à une pauvreté éternelle.
»
 

Une histoire touchante, parfois dure par moments mais qui se lit avec intérêt. Bref, j’ai beaucoup aimé parcourir ce roman. À découvrir vraiment.

La dernière récolte: John Grisham
Robert Laffont 2001

Autres romans de l'auteur sur le blogue: Chroniques de Ford County - Pas de Noël cette année

mardi 25 février 2025

Échancrure : Michel Le Bourhis

 

Thomas est un adolescent écorché vif. Issu d'un milieu difficile, il entretient une véritable passion pour la littérature et les belles éditions, qui le fascinent, le séduisent. Un jour, alors qu'il s'apprête à voler un recueil de Maupassant dans une librairie, une femme d'un certain âge, Micheline, pose une main sur son épaule et propose de le lui acheter. Commence alors une série de rencontres entre cet ancien professeur et ce jeune homme en colère. Ensemble, ils parlent livres, littérature, et de la vie en filigrane. Thomas ne se confie jamais vraiment. Un après-midi, il lui annonce qu'il part voir la mer avec des amis. Sans rien pouvoir faire pour l'éviter, Micheline pressent le drame.

Mon avis (Lu il y a un bon bout)
Je suis tombée en amour avec ce petit livre débordant de tendresse, sensibilité mais aussi plein d’amertume, colère et désarroi. Des émotions très contradictoires que vit Thomas notre héros solitaire, adolescent rebelle, observant l’avenir d’un mauvais œil, rêvant en secret de Sandrine, dépendant de la musique et amoureux fou des livres. 

Puis il y a Micheline, vieille dame vivant seule, débordante de compassion mais aussi de tristesse envers l’avenir de ces jeunes à qui elle a enseigné il y a un temps! Deux êtres différents en tout mais que seuls les livres rapprocheront puisque, petit à petit, Thomas se confiera et Micheline écoutera. 

Extrait

 Je peux porter un jean bouchonné, boire dans un verre sale, pisser à côté de la cuvette, mais je n'aime pas voir un livre abîmé. Ou alors si, par le temps, l'usure. Comme ceux qui finissent par jaunir dans les cartons, chez Emmaüs. Des livres de poche, des revues, des bandes dessinées, parfois... Des trucs dont les gens se débarrassent lors d'un déménagement, ou parce que le grand-père est mort et qu'il faut vendre la maison, les souvenirs et le papier que plus personne ne lira. […] à nouveau, j'ai caressé le cuir du bout des doigts. Approché mon nez pour sentir l'encre, l'imprimerie, le neuf. J'ai tourné des pages, au hasard. Des pages fines comme de l'OCB. Presque transparentes. On avait envie de les caresser, ces pages-là, tellement c'était doux. Comme l'épaule d'une fille. 

Échancrure se lit comme on déguste un bon repas. J’ai passé un agréable moment aux côtés de Thomas et Madeleine à lire leur rencontre et m’en délecter doucement. Thomas rebelle et introverti, Madeleine empathique.  

Voilà, je n’en écris pas plus. À vous de découvrir ce petit livre où la poésie et la douceur des mots transgressent tout au long des pages. Cette histoire est belle, parfois triste et s’adresse autant à un jeune lectorat qu’à un public adulte. L’écriture y est sans complaisance ni mièvrerie et est très jolie. Bref, ce roman qui nous transporte à travers le chemin bouleversant d’un adolescent blessé par la vie est à découvrir. 

Échancrure : Michel Le Bourhis
Éditions du Seuil, 2007