mercredi 4 mars 2015

Poésies complètes d'Émile Nelligan


Citation
Comme Rimbaud, Émile Nelligan, poète d'origine irlandaise, a connu une heure de gloire, qui s'est étalée sur un court laps de temps, soit de 1896 à 1899. Ce beau jeune homme vécut son apogée à 17 ans, après quoi il sombra dans l'abîme du rêve, expression qui désignait à l'époque la folie. On peut comprendre que, vivant auprès d'un père opposé à l'expression de son don pour l'écriture, son âme s'enroula comme un serpent pour s'étouffer elle-même. De par la facture de ses poèmes, il appartient à l'école parnassienne. Son oeuvre retrace son enfance et laisse paraître son manque de maturité, qui l'incline vers son moi qu'il sent déprécier. En ce sens, il est bien de son âge. Mais ses préoccupations alimentent surtout les pensées propices au mois de novembre. Sa vie fut un automne qu'il termina dans l'hiver glacial des murs d'un institut psychiatrique.

Petit mot
Il est difficile d'émettre une critique sur un tel recueil. Cependant laissez-moi vous dire que ce qu’on retrouve dans ce bouquin reflète la vie d'un être blessé au plus profond de son âme. Ses mots sont d'une écriture qui atteint le cœur et l’âme.
 Ce livre est pour moi un coffre aux trésors débordant de poésies inoubliables. Une référence, vraiment.


Un poète
Laissez-le vivre ainsi sans lui faire de mal ! 
Laissez-le s'en aller ; c'est un rêveur qui passe;
C'est une âme angélique ouverte sur l'espace, 
Qui porte en elle un ciel de printemps auroral.

C'est une poésie aussi triste que pure 
Qui s'élève de lui dans un tourbillon d'or. 
L'étoile la comprend, l'étoile qui s'endort 
Dans sa blancheur céleste aux frissons de guipure.

Il ne veut rien savoir ; il aime sans amour. 
Ne le regardez pas ! Que nul ne s'en occupe ! 
Dites même qu'il est de son propre sort dupe ! 
Riez de lui !... Qu'importe ! Il faut mourir un jour...

Alors, dans le pays où le bon Dieu demeure, 
On vous fera connaître, avec reproche amer, 
Ce qu'il fut de candeur sous ce front simple et fier 
Et de tristesse dans ce grand oeil gris qui pleure !

Poésies complètes d'Émile Nelligan
Fides 1950, Réédition 1979

2 commentaires:

Marion a dit...

Sublime !

Parfois, je me demande si des gens peuvent rester insensibles à une telle beauté... Je crois que c'est impossible. S'ils le sont,c'est qu'ils luttent pour refouler leurs sentiments, car on ne peut pas, je crois, ne pas frissonner en lisant ces mots-là.

Merci Suzanne et belle fin de semaine.

Suzanne a dit...

@ Marion

C'est difficile en effet de ne rien ressentir face à de tels écrits.
Merci de tes mots gentille dame.